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I give you my blue word(s) (almost public exercises), 2023, Gilles Hellemans
— Cette création est une plateforme qui invite le public à réfléchir sur l'aliénation urbaine et la solitude, tout en encourageant son adaptation et sa participation dans l'espace artistique.
Depuis 2018, Hellemans est fasciné par les bancs du métro et travaille en collaboration avec eux, en particulier dans la ville de Bruxelles, où ces stations possèdent une esthétique si particulière en contraste avec une architecture aliénante. Ces espaces souterrains, accompagnés d'odeurs désagréables, évoquent souvent des sentiments d'inconfort. Hellemans a commencé par les traduire en langage à travers des poèmes et des textes, en imaginant des performances autour d'eux, et en les reproduisant dans des maquettes architecturales. Ces maquettes se sont ensuite agrandies pour devenir des structures grandeur nature, utilisées par l'artiste pour explorer des thèmes tels que la gentrification et la relation entre le corps humain et l'architecture. Le banc est ainsi devenu un outil d'extension et de mesure de l'homme. Les tubes ont été réduits à une simple ligne bleue (parfois orange ou noire), symbolisant la continuation, l'altération ou l'immersion dans l'architecture.
Lors de sa résidence à Bizet Bizar, Hellemans s'est inspiré de la grille de lignes appliquée au parking en béton par Dear pigs, pour créer un geste miroir avec des tubes bleus. Après avoir visité le site et ressenti les tremblements du sol lorsque le métro passe en dessous, il est devenu évident pour lui de ramener l'essence des sièges de métro dans la structure des tubes. Par une coïncidence, il a découvert que la station de métro Bizet, située à proximité, abrite une oeuvre sculpturale du dramaturge Tone Brulin, où des tubes bleus très similaires représentent une scène de théâtre.
Le banc devient ainsi une confirmation du parking, une référence au métro, mais surtout une plateforme (ou une scène) pour la communication et la réflexion sur les effets isolants de la société contemporaine. Le long tube étiré et la chaise isolée illustrent l'idée d'aliénation et de solitude, alors que le bleu vibrant de la sculpture rayonne et marque sa présence de façon indéniable.
L'artiste a travaillé en collaboration avec les enfants d'une école primaire voisine, les emmenant à l'intérieur (une visite à la station de métro, parcours art urbain...) et à Bizet Bizar. Ils ont réfléchi à l'espace public et à l'environnement de leur école, se posant des questions telles que : que signifie partager un message avec sa communauté ? Comment pouvons-nous partager un tel message ? Ensemble, ils ont construit un prototype de la sculpture en utilisant du carton et du ruban adhésif, devenant ainsi de véritables participants au processus de création.
La sculpture possède une esthétique minimaliste et fonctionne apparemment comme un banc, bien qu'elle ne propose qu'une seule place assise. L'artiste a choisi une esthétique simple et accessible pour favoriser une proximité et des interactions sociales. La sculpture en tant qu'objet de design fonctionnel reste ouverte, indéterminée et inachevée. Elle laisse ainsi l’opportunité aux passant.e.s de s’en emparer et d’imaginer de nouvelles formes d’utilisations. En ce sens, la sculpture pourrait être une rampe de skate l’après-midi et le soir s’incarner autour d’une table lors d’un repas partagé. Les sculptures en forme de tube font souvent référence, d'un point de vue esthétique, à des clôtures ou à des frontières. Elles évoquent aussi l'idée du "moi" et de "l'autre", du privé et du public. Dans un sens, elle renvoie l’image d’une privatisation grandissantes des espaces publics. Mais encore, font écho à ces nouvelles frontières à l’intérieur des villes qui ne s’accroitre et de se gentrifier. L'objectif de l'artiste à travers son oeuvre, au contraire, est de créer un espace d’inclusion et de participation.
Lors de la journée d'inauguration de la sculpture I give you my blue word(s) (almost public exercises) les enfants de l'école primaire Veeweide présenteront les idées sur lesquelles ils ont travaillé avec l'artiste. Ce sera l’occasion pour les élèves, de partager les messages qui leur semblent importants dans l'espace public. Les enfants issus d'autres projets MUS-E Belgium seront également invités à laisser leur empreinte ou tout simplement à visiter le banc. Au cours de l'après-midi, la sculpture sera utilisé pour rassembler les participant.e.s autour d’une table et de chaises supplémentaire pour partager un repas de quartier de type "potluck", offrant ainsi une première occasion d’une nouvelle utilisation à la sculpture-banc. Plus tard dans la soirée, l'artiste Gilles Hellemans et d'autres artistes invités activeront la sculpture par des interventions performatives. À partir de ce jour, l'oeuvre continuera d'inviter le public à participer à des moments variés, sous le nom de "blue-bench-sessions" et fera partie intégrante du paysage urbain d’Anderlecht, en jouant pleinement son rôle d'oeuvre d'art publique.
